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Intelligence émotionnelle et CNV: reconnaître, nommer et ressentir pleinement ses émotions

Pendant longtemps, je ne pouvais nommer que deux choses: « agréable » ou « désagréable ». C’était la seule façon que j’avais de parler de ce que je ressentais. Tout ce qui me faisait du bien, c’était « agréable ». Tout ce qui me pesait ou me dérangeait, c’était « désagréable ». Impossible d’aller plus loin.

Avec le recul, je réalise que je n’avais jamais appris à écouter mes émotions, ni à les identifier. Les sensations venaient, parfois fortes, parfois diffuses, mais je passais vite à autre chose. Je n’avais pas les repères, pas les mots, et surtout pas l’habitude de me demander ce que je ressentais vraiment.

Ce flou émotionnel est loin d’être un cas isolé. Beaucoup d’entre nous ont grandi sans apprendre à se relier à leur vie intérieure. On vit, on agit, on encaisse — mais on ne s’arrête pas pour écouter, accueillir, ressentir. Mettre des mots précis sur ce qu’on vit, c’est un apprentissage à part entière, une clé pour développer son intelligence émotionnelle.

C’est à travers mon parcours en Communication Non Violente (CNV), l’écoute du corps, et certains outils concrets que j’ai commencé à élargir ce langage intérieur. Ce texte retrace ce chemin. Un chemin pour apprendre à reconnaître, à nommer et à ressentir pleinement ses émotions.


1. Le début du chemin : vivre en “agréable” ou “désagréable”

Je me souviens très bien de cette époque où je ne savais pas vraiment ce que je ressentais. Ce n’est pas que j’étais coupée de mes émotions — au contraire, il se passait beaucoup de choses en moi — mais je n’avais que deux mots pour en parler: agréable ou désagréable.

C’était devenu une sorte de langage émotionnel binaire. Quand une situation me faisait du bien, je la qualifiais simplement d’agréable. Et quand je me sentais mal, oppressée ou confuse, je disais que c’était désagréable. Cela me semblait normal. Je ne savais pas qu’une autre façon d’exprimer mon ressenti existait.

Mais avec le recul, je réalise à quel point ce vocabulaire limité me coupait de moi-même. Ces mots « agréable » et « désagréable » recouvrent pourtant une grande variété de vécus et de ressentis. Mais faute de les identifier plus finement, je ne pouvais pas entendre ce que mes émotions cherchaient à me dire. Et je ne pouvais pas non plus les relier à un besoin.

C’est ce qu’on appelle parfois l’analphabétisme émotionnel: ce n’est pas une absence de ressenti, mais un manque de repères pour le nommer. Peu d’entre nous ont reçu une éducation émotionnelle. On nous a appris à réfléchir, à performer, à nous adapter… mais pas à ressentir.

Pourtant, nos émotions sont là, tout le temps. Elles nous traversent, nous alertent, nous relient à ce qui compte. Quand on ne sait pas les reconnaître, elles deviennent floues et envahissantes. Elles finissent par s’exprimer autrement : par le corps, les tensions, les comportements automatiques ou le repli.

Aujourd’hui, je me sens émue en repensant que j’ai vécu aussi longtemps avec autant d’intensité intérieure, sans le langage pour en parler. Comme si j’étais restée étrangère à une part essentielle de moi-même : ma vie émotionnelle.

Ce constat a été le point de départ d’un chemin de reconnexion. Une envie de sortir du flou. De mieux me comprendre. Et surtout, de retrouver une clarté intérieure que je n’avais jamais connue.


2. Ce que la CNV m’a appris sur mes sentiments

Quand j’ai découvert la Communication Non Violente (CNV), j’ai été frappée par la clarté de son processus: observation, sentiment, besoin, demande. Sur le papier, tout semblait évident. Mais en pratique, dès qu’il a fallu identifier ce que je ressentais… je suis restée bloquée.

Je voyais bien que c’était une étape essentielle, et pourtant, elle m’était presque inaccessible. Dans les cercles de pratique, je ne parvenais à dire que deux mots : joie ou tristesse. En réalité, je traduisais encore mon vieux réflexe: « agréable » devenait « joie », et « désagréable » devenait « tristesse ». Mais au fond, je ne sentais pas que ces mots résonnaient vraiment.

Ce que j’ai aimé avec la CNV, c’est qu’elle m’a offert un chemin pour sortir progressivement de ce flou. Elle m’a appris à accueillir ce que je ressens. À rester un instant avec mes sensations, à écouter plus finement.


👉 Pour une introduction plus détaillée à la CNV et à son processus en 4 étapes, vous pouvez lire mon autre article :


🌱 Apprendre à écouter vraiment

Petit à petit, j’ai appris à faire une pause, à écouter mes émotions et à ressentir ce qui se passe en moi avant de nommer. Derrière un mot générique, il pouvait y avoir mille nuances: colère, gêne, peur, tendresse, gratitude… Ce moment d'écoute intérieure pour m'accueillir est essentiel.

La CNV m’a offert un espace pour explorer ces nuances, à mon rythme, sans me forcer, mais en me guidant avec précision.


🔍 Faire la différence entre un sentiment et un jugement

Un autre déclic essentiel: différencier un sentiment d’un jugement. Dire « je me sens rejetée » ou « ignorée », ce n’est pas un sentiment, c’est une interprétation de ce que je crois que l’autre fait. En réalité, je ressens peut-être de la solitude, de la tristesse, ou de la confusion. Ce recul m’a aidée à reprendre la responsabilité de mon vécu, et à ouvrir un dialogue plus vrai, sans accusation cachée.


🔗 Sentiments et besoins : une connexion précieuse

Enfin, la CNV m’a appris que toute émotion est un signal. Une émotion agréable m’indique qu’un besoin est nourri. Une émotion désagréable me montre qu’un besoin est insatisfait. Cela a changé mon regard : mes émotions sont devenues des alliées, pas des obstacles.


🧶 Élargir mon vocabulaire émotionnel

Enfin, en élargissant mon langage émotionnel, j’ai appris à accueillir davantage de nuances, à reconnaître ce qui se passe en moi avec plus de finesse et de respect. Ce n’est pas juste une question de mots : c’est une qualité de présence à soi. Une nouvelle manière d’habiter mes ressentis.


3. Écouter son corps pour affiner l’émotion

Avant même de savoir ce que je ressens, c’est mon corps qui parle. Il le fait en silence, à travers des sensations parfois subtiles, parfois envahissantes : une boule dans la gorge, une tension dans le ventre, le souffle coupé ou accéléré. Longtemps, je les ai ignorées ou minimisées. Mais ce sont elles, en réalité, les premiers signaux de mon vécu émotionnel.

Avec le temps, j’ai appris à ne plus chercher immédiatement un mot pour qualifier ce que je ressens. Au lieu de cela, je commence par revenir à mes sensations physiques. Où est-ce que ça se passe ? Est-ce que ça pique, ça tire, ça pèse, ça chauffe ? Est-ce que ça se resserre ou au contraire, est-ce que ça s’ouvre ? Ces questions simples m’aident à m’ancrer. À ne pas rester dans ma tête. À ressentir vraiment, sans mentaliser.

Par exemple, si je sens mon plexus solaire complètement noué, je n’essaie plus de le fuir ou de mettre un mot précis dessus. Je reste un moment avec cette sensation, en silence. Et souvent, à partir de ce contact corporel, une émotion émerge plus clairement : la peur, la confusion, ou un sentiment d’urgence. D’autres fois, une image me vient, ou une phrase intérieure. Le corps ouvre une porte. Il est une passerelle entre ce qui se vit profondément et ce que je peux reconnaître consciemment.

Cette approche a radicalement changé ma manière d’entrer en lien avec mes émotions. Avant, je restais bloquée dans des étiquettes globales. Maintenant, je m’appuie sur le corps pour affiner mon ressenti. C’est plus lent, mais c’est aussi plus vrai.

C’est exactement ce que propose la CNV : ressentir une sensation, c’est souvent la première marche vers un sentiment plus clair.

En écoutant le corps, je me rapproche de mes émotions les plus authentiques. Parfois l’émotion associée émerge tout de suite, parfois elle demande un peu de temps pour se préciser — mais le corps, lui, reste toujours un bon point de départ.

Ce que j’ai compris, c’est que le corps ne ment pas. Il ne passe pas par le filtre de la bienséance ou de l’auto-censure. Il dit ce qui est. Et quand je prends le temps de l’écouter, je me rapproche un peu plus de moi-même.


4. Des outils pour développer son intelligence émotionnelle

Pour mieux comprendre et affiner ce que je ressens, j’ai découvert qu’avoir des outils adaptés est une vraie richesse. La conscience émotionnelle ne se développe pas spontanément, elle s’apprend, se cultive. Parmi ceux qui m’ont le plus aidée, il y a d’abord le modèle Arousal-Valence. Ce modèle simple et puissant permet de situer une émotion selon deux axes : l’intensité (arousal) et la tonalité (valence). Ainsi, on peut distinguer si ce qu’on ressent est léger ou très fort, agréable ou désagréable. Ce repère m’a offert une grille pour comprendre la complexité de mes émotions, qui ne sont ni tout blanc ni tout noir, mais souvent un mélange nuancé.

Dans la pratique de la Communication Non Violente (CNV), plusieurs outils viennent enrichir cette conscience. La fameuse liste des sentiments est un incontournable : elle propose une variété de mots qui dépassent largement le simple “tristesse” ou “joie”, et permet de nommer des émotions plus fines comme la honte, l’émerveillement, la frustration ou la sérénité. J’ai aussi utilisé des cartes des émotions ou la roue des émotions qui sont des supports visuels très parlants. Ces outils rendent plus tangible ce qui bouillonne à l’intérieur et invitent à explorer ses ressentis avec curiosité, plutôt qu’avec jugement.

Par ailleurs, se munir d’un dictionnaire des émotions peut également aider. Ce type de ressource offre des définitions précises, des synonymes, des exemples concrets. Cela m’a permis d’enrichir mon vocabulaire émotionnel, mais aussi de mieux comprendre la nature de chaque sentiment, ses nuances, ses intensités. Plus je découvrais de mots, plus je sentais que mon monde intérieur devenait riche et accueillant.

Sur le plan corporel, j’ai intégré des pratiques d’ancrage, de respiration consciente (cohérence cardiaque) et de scan corporel. Ces exercices m’aident à revenir dans l’instant présent, à ressentir les sensations physiques avec bienveillance, à observer comment elles évoluent. Le corps est une boussole précieuse pour affiner la conscience émotionnelle. Par exemple, la respiration profonde calme le mental et permet d’entendre plus clairement ce qui se passe en moi. Le scan corporel, qui consiste à parcourir lentement son corps en portant attention aux zones de tension ou de relâchement, ouvre une porte vers les émotions enfouies.


👉 Pour en savoir plus sur la cohérence cardiaque:


Grâce à ces outils, j’ai pu non seulement mieux identifier mes émotions, mais aussi les accueillir pleinement, avec douceur et respect. J’ai découvert qu’au-delà des mots, c’est l’attention portée qui crée un espace pour que les émotions s’expriment librement. Ce chemin m’a rendue plus sensible, plus disponible à moi-même et aux autres.

Cependant, j’ai aussi appris à ne pas me figer dans ces grilles et ces catégories. Le danger serait de s’enfermer dans un vocabulaire rigide, de vouloir absolument classer ses émotions comme si elles étaient des objets statiques. Les émotions sont vivantes, fluides, parfois contradictoires. Garder une part d’imprévu, d’écoute intuitive, est indispensable pour rester connecté à la richesse et à la profondeur de ce qui se joue en moi. Les outils sont là pour guider, pas pour enfermer.

Ainsi, élargir sa conscience émotionnelle, c’est à la fois apprendre à nommer avec précision, et s’ouvrir à la dimension mouvante et vivante de nos ressentis. C’est un équilibre entre structure et liberté, entre compréhension et accueil. Cette démarche transforme peu à peu la relation que j’entretiens avec mes émotions, qui deviennent alors des alliées précieuses sur mon chemin de vie.


5. Intelligence émotionnelle au quotidien : reconnaître, nommer, ressentir

Reconnaître mes émotions, les nommer, les ressentir pleinement… cela a transformé ma manière de vivre. Petit à petit, j’ai gagné en lucidité. Avant, je réagissais souvent sans comprendre ce qui se passait en moi. Maintenant, je peux dire plus clairement : « je suis tendue », « je suis triste », « je suis confuse »… et déjà, cela change quelque chose. Mettre un mot juste, c’est éclairer une zone d’ombre. C’est sortir de la confusion.

Ce chemin m’a aussi appris la douceur de l’auto-empathie. J’ai longtemps cru qu’il fallait être forte, avancer, dépasser mes émotions. Aujourd’hui, je sais que je peux m’arrêter, ressentir ce qui est là, sans jugement. Accueillir ma peine, mon agacement, mon découragement… sans chercher à les étouffer ni à les dramatiser. Juste être là, avec moi. C’est un geste simple, mais profondément réparateur.

Et cela change aussi ma relation aux autres. Quand je sais ce que je ressens et ce dont j’ai besoin, je peux le partager de façon plus authentique et responsabilisée. Le lien devient plus vrai, plus vivant. Même dans les désaccords, il y a de l’espace pour l’écoute.

Enfin, cette présence aux émotions me rend plus libre intérieurement. Moins prise dans des réactions automatiques, des impulsions, des défenses. Je peux sentir ce qui monte… et choisir comment répondre. Ce n’est pas toujours fluide, ni immédiat. Mais chaque fois que je prends ce temps-là, je sors d’un schéma ancien pour entrer dans un rapport plus conscient à moi-même.

C’est un chemin de présence. Pas un outil magique, mais une pratique vivante, au quotidien.


Conclusion – Une présence à soi, jour après jour

Ce chemin vers une conscience émotionnelle plus fine n’a rien d’un acquis figé. C’est une pratique quotidienne, vivante, parfois fluide, parfois cahoteuse. La Communication Non Violente m’a offert une boussole précieuse pour m’orienter à l’intérieur de moi. Elle m’a appris à ralentir, à écouter au lieu d’analyser, à ressentir avant de vouloir comprendre.

Nommer une émotion, ce n’est pas simplement trouver le bon mot dans une liste. C’est une manière de me rencontrer avec honnêteté et respect. De ne plus fuir ce que je vis, mais au contraire, de m’en approcher. Et c’est là que la transformation devient possible.

Au fil du temps, cette qualité d’écoute a nourri en moi une intelligence émotionnelle plus incarnée. J’ai découvert que même les émotions les plus inconfortables pouvaient devenir des alliées, dès lors que je leur donnais de la place.

Ce que je retiens surtout, c’est que cette qualité de lien à moi-même change profondément ma manière d’être au monde. Elle ouvre un espace de clarté, de paix et de responsabilité – d’abord en moi, puis dans la relation à l’autre.

Et chaque jour, je réapprends. Avec curiosité. Avec cette envie de rester fidèle à ce que je ressens vraiment.



une femme est en train de se recentrer, elle connecte à ses sentiments, à son intelligence émotionnelle, elle pratique la Communication Non Violente, CNV. Cécile Bocquin, alchimiste de l'âme, énergéticienne et formatrice.


 
 
 

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